Plante grimpante, rampante, liane : le lierre est un drôle de phénomène. Très apprécié par certains, détesté par d’autres, il n’est pourtant pas le parasite que sa réputation laisse supposer. Le lierre n’étouffe pas les arbres et n’est pas une espèce envahissante, mais joue un rôle essentiel dans la biodiversité. C’est notamment grâce à sa floraison tardive que les abeilles domestiques peuvent faire des réserves de nourriture avant l’hiver. Quelle est l’origine de cette plante hors du commun ?
Cette plante étonnante que l’on appelle lierre
Elle nous paraît si commune que nous ne nous interrogeons presque plus sur son originalité. Pourtant, à bien des égards, le lierre est une plante extraordinaire. Très verte, furieusement résistante, se faufilant partout et fleurissant à l’automne, atteignant des hauteurs et des épaisseurs vertigineuses, alors même qu’elle est capable de serpenter et s’enrouler à peu près partout, d’où vient-elle et par quelle curieuse évolution a-t-elle pris cet aspect ?
Probablement d’origine tropicale et pourtant connue depuis longtemps sous nos latitudes, le lierre est une des rares lianes d’Europe. La clématite, le houblon et le chèvrefeuille en sont les trois autres.
De son origine supposément tropicale, elle a conservé le goût du soleil et de l’humidité et prospère les étés chauds et arrosés. Ses tiges ligneuses sont rampantes et grimpantes, et la même plante peut atteindre des dimensions qu’aucun arbre de nos contrées n’égale : jusqu’à 100 mètres de long !
Son nom scientifique Hedera helix la désigne comme la plante qui s’attache et s’enroule, ce qui signifie que l’espèce que l’on connaît aujourd’hui est probablement différente de celle que connaissaient les Grecs anciens. Et en effet, le lierre, pour se hisser vers la lumière du soleil, s’accroche au support qu’il trouve par de petits crochets. En revanche, le lierre de nos régions ne prend plus cette forme d’enroulement en vrille que lui ont sans doute connue nos ancêtres. En réalité, ces petits crampons sont des racines adventices que la plante produit pour s’accrocher, mais le lierre ne capte l’eau et les nutriments dont il a besoin que par son système racinaire souterrain, ainsi que par les feuilles, en très petite quantité.
On ne peut donc pas accuser le lierre de parasiter les arbres et il est absolument faux de penser qu’il se nourrit de leur sève.
Diverses variétés de lierre
A l’origine, nous ne connaissons qu’une variété de lierre en Europe, bien que les naturalistes aient distingué au XIXe siècle le lierre rampant, dit stérile, du lierre grimpant. C’est qu’en réalité, le lierre ne fleurit qu’élancé vers le soleil. C’est aussi pourquoi il est essentiel de le laisser escalader les troncs d’arbres de nos forêts. Ses fruits sont en effet une manne pour de nombreux oiseaux, et ses fleurs nourrissent une quantité d’insectes, parmi lesquels nos abeilles domestiques.
Toutefois, aujourd’hui, de nombreuses variétés de lierre sont cultivées pour l’ornement. Cette plante très résistante a été largement répandue comme plante décorative jusqu’en Amérique, Nouvelle-Zélande et Australie où elle n’existe pas à l’état naturel. Ainsi, d’Hedera helix sont nées de nombreuses variétés telles que “Anita” qui est un lierre miniature, “Gavotte” à feuilles de saule, “Sagittifolia variegata” à feuilles sagittées (en forme de flèche ou de lance) vert et crème à cinq lobes dont le lobe central est très allongé. Mais encore “Glacier” à feuilles gris vert, marginé de blanc crème, qui fait un très bon couvre-sol. Ou “Oro di Bogliasco” à petites feuilles à centre jaune. Le lierre est ainsi, comme on le voit, très apprécié comme plante décorative.
Le Lierre nourrit abeilles et oiseaux
De par sa floraison décalée, le lierre est également une plante indispensable à la biodiversité. Non seulement, il est utile en forêt, servant d’abri à une multitude d’insectes et de rongeurs, mais comme il fleurit à l’automne, il fournit aux abeilles leur ultime réserve de nourriture pour l’hiver. C’est surtout grâce à sa floraison qu’elles sont capables de passer l’hiver et de patienter jusqu’aux premières fleurs de printemps.
Par ailleurs, fleurissant à l’automne, le lierre porte des fruits à la toute fin de l’hiver, ce qui est extrêmement utile aux oiseaux, notamment les passereaux qui s’en repaissent et dans le même temps aident le lierre à se reproduire. Ne digérant pas les graines qui sont dans le fruit, ces petits oiseaux les rejettent dans leurs excréments, ce qui permet au lierre de coloniser de nouveaux espaces.
Ainsi, le lierre, loin d’être ce parasite pour lequel on le fait souvent passer, vit dans une forme de mutualisme avec les arbres des forêts. Il leur offre des prédateurs pour les parasites, tels la coccinelle, leur attire les pollinisateurs, toute une vie grouillante qui contribue à leur bien-être et, aux environs d’un verger, par exemple, cette présence est très utile pour chasser les indésirables. En fin de compte, le lierre est un très bon auxiliaire pour le forestier comme pour le cultivateur.
Chaque organisme vivant a sa place dans la nature pour contribuer à une vie saine et équilibrée.